EFFETS DU TRAITEMENT OSTÉOPATHIQUE GENERAL (T.O.G.) SUR LA STABILITÉ POSTURALE CHEZ LES PERSONNES ÂGÉES AUTONOMES – Antoine Del Bello – Ostéopathe et kinésiologue au coeur de Shawinigan, en Mauricie

EFFETS DU TRAITEMENT OSTÉOPATHIQUE GENERAL (T.O.G.) SUR LA STABILITÉ POSTURALE CHEZ LES PERSONNES ÂGÉES AUTONOMES – Antoine Del Bello – Ostéopathe et kinésiologue au coeur de Shawinigan, en Mauricie | Thierry Payet

INTRODUCTION

Les chutes et les blessures liées aux chutes constituent un problème d’actualité observé à l’échelle mondiale (Agence de Santé publique du Canada, 2014 ; Wu et al., 2013). À mesure que la population vieillit, le fardeau psychologique, social et personnel associé aux chutes augmente (Canadian Disease Center, 2016) et constitue une préoccupation importante pour les professionnels de la santé. Il est estimé que 30 pour cent des personnes âgées de 65 ans et plus rapportent avoir eu une chute par an (Carroll, Slattum et Cox, 2005 ; Hausdorff, Rio et Edelberg, 2001 ; Kannus et al., 1999) et cette proportion passe à 50 pour cent chez la population âgée de 80 ans et plus (Inouye, Brown et Tinetti, 2009). Cette situation cause des problèmes de santé et des problèmes économiques majeurs puisque 15 pour cent de la population mondiale sera âgée de plus de 65 ans d’ici 2050 (Organisation mondiale de la santé, 2012). Les chutes sont la principale cause d’hospitalisation au Canada, causant un fardeau économique de deux milliards de dollars. Elles constituent la cause la plus fréquente de douleurs chroniques, d’invalidité fonctionnelle et d’incapacité chez les personnes âgées (Gill, Allore, Halford et Guo, 2004 ; Kannus et al., 2002). En plus des conséquences physiques potentielles des chutes, il a été démontré que les blessures liées aux chutes engendrent un retrait social, une perte d’autonomie et de confiance, des admissions dans des établissements de soins de longue durée et une prédisposition à la dépression et à l’anxiété (Gallagher, Corett et Freeman, 2001; Kannus et al., 1999).

Les facteurs de risque prédisposant aux chutes sont nombreux et peuvent être classés selon qu’ils soient d’ordres biologiques, comportementaux, socio-économiques et environnementaux (Agence de Santé publique du Canada, 2014). Les facteurs biologiques comprennent l’âge, le sexe, les capacités cognitives, les maladies chroniques, la vision, la force des membres inférieurs, les maladies cardiovasculaires, les niveaux sérique de vitamine D et la sévérité des troubles de la marche et de l’équilibre. Les facteurs de risque comportementaux comprennent les antécédents de chutes et l’appréhension à chuter, la médication et le type de chaussure. Les facteurs de risque socio-économiques incluent le soutien social et le revenu, tandis que l’environnement domestique et les conditions météorologiques forment les facteurs de risques environnementaux. Parmi les facteurs de risques associés aux chutes chez les personnes âgées, les troubles de la marche et de l’équilibre ont été identifiés comme étant des facteurs importants (Tuunainen, Raski, Jäntti et Pyykkö, 2014; Ambrose, Paul et Hausdorff, 2013; Wu et al., 2013), et seraient responsables de 10 à 25 pour cent de toutes les causes de chutes (Rubenstein, 2006).

 

 

La stabilité posturale est liée à la capacité de maintenir le centre de masse (CdM) au-dessus de la base de soutien (BdS) (Hall, 1991). L’individu est donc en équilibre lorsque la ligne du CdM se trouve dans la zone de la BdS. Lorsque le CdM se rapproche de la limite de la BdS, la stabilité diminue et plus le déplacement de la ligne de gravité est important, plus le déséquilibre est important. Chez les humains, ce mouvement du CdM sur la BdS est un phénomène naturel et physiologique appelé oscillation posturale (Wallmann, 2009). Une variété de perturbations intrinsèques font de l’oscillation posturale un phénomène normal et physiologique. Celles-ci comprennent le rythme cardiaque, la respiration, les ajustements latéraux et les mouvements de la tête des bras et du tronc (Iqbal, 2011). À tout moment, lorsque mesurées, les oscillations posturales projettent un mouvement aléatoire dans toutes les directions du plan horizontal (Iqbal, 2011). En considérant que les articulations majeures impliquées dans le contrôle postural statique se situent principalement sur le plan sagittal – les chevilles, les genoux et les hanches – les ajustements posturaux statiques observés dans le contrôle postural affectent particulièrement la direction antéro-postérieure (AP) (Iqbal, 2011). Ce mouvement antéro-postérieur observé en posture statique est connu sous le nom du modèle du pendule inversé (Gatev, Thomas, Kepple et Hallet, 1999).

Il a été démontré que l’oscillation posturale augmente naturellement avec le processus de vieillissement. Ceci est un facteur contribuant au déséquilibre observé chez les personnes âgées (Rogind, Lykkegaard, Bliddal et Danneskiold-Samsoe, 2003; Baloh, Corona, Jacobson, Enrietto et Bell, 1998). Dans une revue systématique de Piirtola et Era (2006), une corrélation a été identifiée entre les variables de stabilité posturale, mesurées à l’aide de plate-forme de force, et le risque de chute. Melzer, Benjuta et Kaplanski (2004) ont reconnu que le degré d’oscillation médio-latérale (ML) pouvait identifier les personnes âgées qui avaient déclaré avoir eu deux chutes ou plus au cours des six derniers mois. Le balancement ML, dans des conditions yeux fermés, semble également être prédicteur de chutes, et ce, même chez des personnes âgées en bonne santé et sans antécédents de chute (Maki, Holliday, et Topper, 1994). Par la posturographie, Laughton et al. (2003) ont constaté que les personnes âgées ayant subi une chute avaient significativement plus d’oscillation antéro-postérieur (AP) que les sujets plus jeunes. Baczkowicz, Szczegielniak et Proszkowiec (2008) ont également reconnu que plus le degré d’oscillation postural d’une personne est élevé, plus l’incidence de chutes était importante.

L’équilibre et le contrôle postural sont des tâches sensorimotrices qui intègrent les stimuli sensoriels des systèmes visuels, vestibulaires et proprioceptifs (Konrad, Girardi et Helfert, 1999; Prieto, Myklebust, Hoffmann, Lovett et Myklebust, 1996). L’intégration de cette information se fait à différents niveaux du système nerveux central et entraine une réponse musculo-squelettique adéquate (Konrad, Girardi et Helfert, 1999). Plus précisément, les processus neurophysiologiques impliqués dans le contrôle et la stabilité posturale incluent le Système nerveux central (SNC) composé du cerveau et de la moelle épinière; le système nerveux périphérique, formé par des voies afférentes et efférentes; le système musculo-squelettique composé des muscles et des tendons, et enfin; le système sensoriel, comprenant une variété de récepteurs dispersés qui comprennent les fuseaux musculaires, les organes tendineux de Golgi et les mécanorécepteurs (Kamran, 2011). Le contrôle de la posture doit donc être compris comme un système de contrôle par rétroaction reliant le système nerveux central et le système musculo-squelettique (Guskiewicz et Perrin, 1996), donc, comme une boucle sensori-motrice. Avec le vieillissement, les systèmes sensoriels se détériorent. L’instabilité posturale observée chez la population gériatrique est donc partiellement attribuable à la détérioration naturelle des systèmes susmentionnés.

D’un point de vue ostéopathique, la détérioration progressive des systèmes impliqués dans le contrôle moteur ne constitue qu’un des facteurs contribuant à l’instabilité posturale observée chez l’aîné (Fraix, 2012). En effet, considérant l’approche biomécanique et musculo-squelettique de l’ostéopathie traditionnelle, la stabilité posturale est en partie expliquée par la résultante des forces ascendantes, descendante et des lignes de gravité, développées par John Martin Littlejohn et grandement promues par John Wernham (Liem et Dobler, 2004). Comme le mentionne Fraix (2012), c’est le rôle du praticien ostéopathique de traiter les troubles du système musculo-squelettique afin d’identifier les dysfonctions somatiques qui peuvent potentiellement contribuer aux chutes et aux blessures liées à celles-ci. Fraix (2012) met également l’accent sur l’interaction dynamique existant entre le corps et l’esprit ainsi que sur le fait que l’approche ostéopathique est bien adaptée pour fournir des soins complets et centrés sur le patient. Ce point semble remarquablement important dans la problématique à multiples facettes que constituent les chutes. L’idée d’aborder le système musculo-squelettique par le biais des soins ostéopathiques, afin d’améliorer la stabilité posturale, est partagée par Noll (2013). Noll (2013) reconnaît que l’utilisation du traitement ostéopathique pour prévenir les chutes et améliorer l’équilibre n’a pas encore été entièrement étudiée et qu’elle nécessite un examen plus approfondi. Quelques études ont été effectuées sur le sujet au Collège d’Études Ostéopathiques de Montréal (CEOM) et au Collège Canadien d’Ostéopathie (CCO). En effet, une étude qualitative réalisée par Benoit (2015) a mis en lumière le fait que les ostéopathes incluent une approche ostéopathique musculo-squelettique dans le traitement de leurs patients âgés dans le but de prévenir les chutes et les blessures liées à celles-ci. De plus, les résultats significatifs obtenus par Ionata (2010) concernant la peur de tomber, ceux de Barrette (2012) sur les effets du traitement ostéopathique sur l’évaluation fonctionnelle de l’équilibre et ceux de Cattet (2017) sur les améliorations de variables posturographiques, démontrent le bénéfice clinique potentiel de l’intervention ostéopathique sur la stabilité posturale et sur la prévention des chutes chez les personnes âgées.

Pour mettre en contexte la recherche actuelle, aucune étude au CEOM n’a étudié l’effet du Traitement Ostéopathique Général ou du Traitement Ostéopathique Global sur l’équilibre chez les personnes âgées en utilisant la posturographie. À plus grande échelle, aucune étude ostéopathique n’a documenté son effet sur la stabilité posturale chez les personnes âgées par l’indice de la stabilité posturale et l’indice d’oscillation postural, bien que ce type de variables mesurées soit idéal, aussi bien pour les études pré et post-intervention, que pour les études cliniques (Chaudhry, Bukiet, Ji et Findley, 2011). Considérant une littérature très limitée sur le T.O.G. ainsi que son statut en tant qu’outil ostéopathique original, cette étude possède le potentiel d’aider à ancrer et à objectiver l’efficacité de cette technique.

Cette étude a pour but de renforcer la littérature ostéopathique en évaluant le rôle possible de l’ostéopathie comme outil dans la prévention des chutes. Elle vise à évaluer l’effet du T.O.G. sur la stabilité posturale de l’aîné autonome, mesurée par posturographie, outil de référence dans le contexte de la mesure de l’équilibre chez l’humain.

MÉTHODES

Afin de répondre aux buts et objectifs de recherche, une étude quasi expérimentale avec devis à série temporelle simple a été réalisée. La figure 1 présente une conceptualisation visuelle de l’étude qui s’est déroulée sur 9 semaines et qui incluait 3 traitements ostéopathiques.

Figure 1: conceptualisation visuelle de la série temporelle

La population cible était constituée de personnes autonomes âgées de 65 ans et plus résidant à Montréal et présentant des problèmes d’instabilité posturale légère à sévère. La population accessible était composée de personnes âgées autonomes de 65 ans et plus possédant une instabilité posturale légère à sévère, telle que mesurée par le système posturographique Biosway Biodex, vivant dans des résidences privées pour personnes âgées de Montréal. Précisément au Sommet-de-la-Rive à Verdun et aux Deux-Volets dans Rosemont. Une méthode d’échantillonnage non probabiliste de convenance a été utilisée. Deux périodes de recrutement ont eu lieu entre novembre et décembre 2016, ainsi qu’en août 2017. Suivant les phases de recrutement, deux phases expérimentales ont eu lieu et incluaient respectivement neuf et huit participants, pour un total de 17 participants. Il n’y a eu aucune mortalité expérimentale.

La variable indépendante de cette étude était la séquence de T.O.G., telle qu’enseignée au CEOM (Druelle, 2003). La même méthode d’évaluation et de traitement standardisée a été administrée à tous les sujets, à chacun des trois jours d’intervention, incluant une semaine d’intervalle entre chaque intervention. Le temps passé sur chaque technique de la séquence était dépendant du sujet et le nombre de techniques exécutées dépendait également du sujet.

La variable dépendante de cette étude était la stabilité posturale, composée de l’indice d’oscillation et de l’indice de stabilité posturale recueillie par méthode posturographique. Les données ont été recueillies par le chercheur à trois reprises avant le début de l’intervention (à une semaine d’intervalle), avant et après chacun des traitements ostéopathiques et de nouveau trois fois après la fin de l’intervention (à une semaine d’intervalle). L’indice de stabilité posturale fut subdivisé en indice global, antéro-postérieur (AP) et médio-latéral (ML). Les sujets ont effectué la prise de mesure dans deux conditions : yeux ouverts et yeux fermés. L’évaluation de l’équilibre est actuellement considérée comme le Gold Standard pour l’évaluation de l’équilibre (Patterson, Amick, Thummar et Rogers, 2014; Karimi, 2012; Hinman, 2000). L’outil de posturographie sélectionné pour cette étude était le système Biosway Biodex et fut prêté pour le cadre de cette étude par le CEOM. Selon Hinman (2000), cet outil de mesure possède une excellente fiabilité dans le domaine du test/re-test, supporté par un score ICC de 0.89.

Le consentement pour la participation à l’étude a été obtenu lors de la première rencontre avec les participants. L’information concernant le but de la recherche, les procédures, les bienfaits, les risques potentiels, ainsi que les implications associées à la participation furent discutés. Chaque participant fut informé de son droit de quitter l’étude en tout temps, ainsi que de la procédure mise en place pour assurer la confidentialité des informations fournies, des documents et des données.

Les données recueillies par l’outil de posturographie ont été manuellement compilées dans un fichier Excel et transmises au statisticien Jeremie Alluard qui procéda à l’analyse en utilisant le logiciel R version 3.2.3. Le seuil alpha fut établi à p=0.05 et la puissance à 80%. Toutes les données recueillies ont été analysées statistiquement dans une méthodologie à deux phases. D’abord, une analyse de variance à mesures répétées (ANOVA) accompagnée de comparaisons multiples réalisées sur les données pré-intervention a permis la confirmation d’une stabilité des variables pré-intervention. Par la suite, une analyse ANOVA des données post-intervention a été réalisée, suivie d’une analyse de contraste, permettant une comparaison entre les différents moments de la collecte des données. Pour tenir compte de la multiplicité des tests statistiques utilisés (comparaisons multiples), une correction de Bonferroni a été effectuée afin d’assurer le maintien du seuil alpha à 0.05 pour l’ensemble des données.

RÉSULTATS

Toutes les données recueillies dans le cadre de cette étude ont été obtenues auprès d’une population de 17 participants âgés de 78,5 ± 6,7 ans, vivant dans des résidences pour personnes âgées autonomes et présentant un trouble d’équilibre léger à sévère, tel qu’évalué par le système de posturographie. L’unique groupe expérimental de 17 participants était composé de 23,5% d’hommes (n = 4) et de 76,5% de femmes (n = 13). Tous les participants à l’étude ont été en mesure de finaliser celle-ci. L’étude s’est déroulée sur une période de 9 semaines avec 12 périodes distinctes de collecte de données.

Les variables dépendantes mesurées comprenaient l’indice d’oscillation et l’indice de stabilité posturale. L’indice d’oscillation est indicatif de l’ajustement de la position statique d’un individu au cours du Test de l’Intégration Sensorielle et de l’Équilibre (CISE). Un faible indice d’oscillation se traduit par de faibles amplitudes de mouvement. L’indice de stabilité posturale peut être compris comme un indice représentant l’emplacement moyen du centre de pression (CdP) sur la plate-forme de force bidimensionnelle. L’indice de stabilité posturale est subdivisé en indice antéro-postérieur (AP), médio-latéral (ML) et en indice de stabilité globale. Plus l’indice de stabilité posturale est faible, plus l’emplacement moyen du CdP est près du centre.

À la suite d’une analyse ANOVA appliquée aux données moyennes de l’indice d’oscillation en condition yeux ouverts, des différences statistiquement significatives ont été identifiées. L’analyse de variance comparant la valeur de référence pré-intervention (valeur moyenne des temps pré-intervention) à tous les temps post-intervention a révélé des résultats significatifs à la semaine 6 pré-traitement (p = 0,004), à la semaine 7 (p = 0,001), à la semaine 8 (p = 0,0028) et à la semaine 9 (p = 0,0009). Pour les temps mentionnés, l’indice d’oscillation en condition yeux ouverts était significativement plus faible que la valeur de référence moyenne pré-intervention, ceci se traduisant par une augmentation de la stabilité posturale. La même analyse statistique pour la condition yeux fermés n’a révélé aucune différence statistiquement significative (p = 0,0519).

Représentation graphique de l’index d’oscillation en condition yeux-ouverts

Représentation graphique de l’index d’oscillation en condition yeux-fermés

La même analyse appliquée aux valeurs moyennes de l’indice de stabilité posturale l’AP en condition yeux ouverts et fermés a également révélé des différences significatives. En condition yeux ouverts, une différence significative fut identifiée à la semaine 4 post-traitement (p = 0,0061), à la semaine 5 pré et post-traitement (p <0,0001), à la semaine 6 pré et post-traitement (p <0,0001), à la semaine 7 (p <0,0001), à la semaine 8 (p <0,0001) et à la semaine 9 (p <0,0001). Pour la condition yeux fermés, une différence significative fut également identifiée à la semaine 4 post-traitement (p = 0,0379), à la semaine 5 pré et post-traitement (p <0,0001), à la semaine 6 pré et post-traitement (p <0,0001), à la semaine 7 (p <0,0001), à la semaine 8 (p <0,0001) et à la semaine 9 (p <0,0001). Pour toutes les variables et les temps mentionnés, l’indice de stabilité posturale était significativement plus faible que les valeurs de référence moyennes avant l’intervention, se traduisant par une augmentation de la stabilité.

Représentation graphique de l’index de stabilité postural antero-posterieur en condition yeux-ouverts

Représentation graphique de l’index de stabilité postural antero-posterieur en condition yeux-fermés

Finalement, l’analyse statistique appliquée aux valeurs moyennes de l’indice de stabilité posturale ML en condition yeux-ouverts et fermés a également révélé des différences significatives. Globalement, la tendance n’a pas changé en fonction du temps. À l’exception des valeurs significativement augmentées à la semaine 4 post-traitement (p = 0,0130) et à la semaine 6 post-traitement (p = 0,0397), en condition yeux ouverts et à la semaine 4 post-traitement (p = 0,0409) et à la semaine 6 post-traitement (p = 0,0166), en condition yeux fermés. Pour les variables et les temps mentionnés, les moyennes d’indice de stabilité posturale étaient significativement plus élevées que la valeur moyenne de référence pré intervention, ceci se traduisant par une diminution de la stabilité posturale suivant directement le traitement ostéopathique de la semaine 4 et de la semaine 6.

Représentation graphique de l’index de stabilité postural medio-lateral en condition yeux-ouverts

Représentation graphique de l’index de stabilité postural medio-lateral en condition yeux-ouverts

 

DISCUSSION ET CONCLUSION

Des résultats significatifs concernant l’indice d’oscillation dans la condition yeux ouverts suggèrent la capacité du T.O.G. à diminuer la quantité de mouvements oscillatoires des participants en position debout statique. L’augmentation de l’oscillation posturale observée chez la population âgée prédispose constamment le mouvement involontaire du CdP près des limites de la BdS et est documentée comme un important facteur de risque de chutes. Par conséquent, le mouvement constant du CdP près des limites de la BdS se traduit par un risque perpétuel d’instabilité et de déséquilibre. En effet, lorsque le CdP atteint les limites de la BdS dans n’importe quel plan de l’espace, un déséquilibre est entrainé et une stratégie de mouvement doit être enclenchée afin de retrouver la stabilité. Le fait de limiter la quantité de mouvement en station debout pourrait donc être un facteur de prévention des chutes du fait que cela limite le mouvement continu du CdP sur la BdS. Cette amélioration statistiquement significative en condition yeux ouverts peut être physiologiquement expliquée par l’intermédiaire des systèmes proprioceptifs, vestibulaires, corticaux et musculaires. Considérant la méthodologie incluant une condition yeux-ouverts et yeux-fermés, ainsi que la nature statique de la collecte de données de cette présente étude, l’influence du T.O.G sur le système proprioceptif ressort comme l’hypothèse neurophysiologique la plus probable. Ce qui vient potentiellement appuyer les travaux classiques du physiologiste et ostéopathe Irvin Korr (Korr, 1976).

Également observée, la capacité du T.O.G. à réduire de manière significative l’indice de stabilité posturale antéro-postérieure en condition yeux-ouverts et yeux-fermés, et par conséquent, à re-centrer la position moyenne de CdP dans l’axe-y. En revanche, l’analyse statistique a révélé l’inefficacité du T.O.G. à réduire significativement l’indice de stabilité posturale ML, dans les deux types de conditions. Les changements observés dans l’axe-y (antero-posterieur) et l’absence de changement dans l’axe-x (médio-latéral) supportent la littérature en ce qui concerne le modèle du pendule inversé (Gatev, Thomas, Kepple, Hallet, 1999), ainsi que les stratégies de mouvements (Wallman, 2009). Un indice de stabilité posturale réduit se traduit par une position moyenne du CdP plus proche du centre, donc plus éloigné des limites de la BdS. L’augmentation de la distance entre le CdP et les limites de la BdS augmente la stabilité en créant une « zone tampon ». En effet, le CdP du corps doit parcourir une plus grande distance avant d’atteindre la limite de la BdS et permet donc plus de temps de réaction pour permettre au sujet de se stabiliser. Cela n’est vrai que pour une vitesse de déplacement d’un CdP fixe, une variable qui n’a pas été mesurée dans la présente étude. Des modifications posturales et des changements dans l’activité musculaire sont des hypothèses mises de l’avant pour tenter d’expliquer les changements observés chez les participants, mais plus de recherches seront nécessaires pour valider ces hypothèses.

Une observation intéressante a été faite lorsque les participants ont été évalués directement après les séances de T.O.G. En effet, une instabilité posturale était parfois présente et cela pourrait correspondre à un temps d’intégration somato-sensorielle. Cette constatation suggère la nécessité, au niveau clinique, de prévenir les patients âgés de ce possible déséquilibre transitoire suivant les séances de TOG.

Les observations obtenues à partir de la présente étude suggèrent l’efficacité du traitement ostéopathique général dans l’augmentation de la stabilité posturale chez les personnes âgées autonomes. En effet, comme le révèle la diminution significative de l’indice d’oscillation en condition yeux ouverts, et la diminution significative de l’indice de stabilité posturale antéro-postérieure dans les deux conditions (yeux ouverts et yeux fermés), le protocole de T.O.G. a été efficace pour améliorer l’équilibre statique dans la cohorte gériatrique de cette étude. Considérant le risque associé à une augmentation de l’oscillation posturale, les résultats de cette étude suggèrent que l’intervention ostéopathique chez les personnes âgées présentant des troubles d’équilibre mérite d’être étudiée davantage. Le soin ostéopathique pourrait donc jouer un rôle préventif dans la prise en charge multidisciplinaire de la chute. L’efficacité de l’intervention réside potentiellement dans son influence sur tous les niveaux de contrôle moteur, c’est-à-dire l’optimisation potentielle des parties afférentes, intégratives et efférentes de la boucle sensori-motrice sous-jacente au contrôle postural. Enfin, les résultats de cette étude mettent de l’avant la nécessité de poursuivre la recherche ostéopathique dans le domaine de l’équilibre et de la posture chez les personnes âgées autonomes.

Par ailleurs, la présente étude possède d’importantes considérations ostéopathiques par rapport à la démonstration objective de l’efficacité du T.O.G. Cette étude enrichit la mince littérature existante sur le traitement ostéopathique général et son efficacité en tant qu’approche musculo-squelettique. Ces observations soutiennent l’enthousiasme de Wernham pour cette technique historique, quoique possiblement expliquée par des moyens différents. En effet, compte tenu des connaissances actuelles, les modèles biomécaniques sous-tendant un paradigme compressif tel que celui de Littlejohn sont remis en question. Parmi la variété de modèles biomécaniques contemporains, la tenségrité semble faire surface dans une multitude de domaines tels que l’ostéopathie. Cette façon différente de modéliser la biomécanique humaine mérite une sérieuse réflexion considérant qu’elle semble apporter des réponses aux questions non résolues du modèle développé par Littlejohn. L’humble questionnement sur une transition potentielle de la compréhension ostéopathique de la biomécanique, passant d’un paradigme de compression illustré par le modèle de Littlejohn à un paradigme de tenségrité, peut être un pas vers une compréhension plus unifiée des phénomènes mécaniques humains et de la santé.

En dépit des résultats prometteurs de cette étude, la prudence s’impose concernant l’interprétation et concernant les conclusions pouvant en être tirées. En effet, le devis quasi-expérimental ne permet pas de contrôle de l’effet placebo, la taille de l’échantillon (n=17) est limitée et l’échantillonnage de convenance peut amener un biais de sélection. Tous ces éléments limitent la transférabilité des résultats et la force de ceux-ci. De plus, le chercheur a opéré lui-même l’appareil de posturographie, ce qui constitue une faiblesse importante de l’étude. Ce choix méthodologique a été fait pour tenir compte de l’aspect de faisabilité, mais affecte négativement la validité interne de l’étude.

Redonner le rythme inhérent aux patients gériatriques via le Traitement Ostéopathique Général représente une humble contribution ostéopathique à leur bien-être. Cette population croissante symbolise un reflet du passé qui possède une expérience riche et une compréhension unique de ce monde complexe en constant changement. D’après les résultats de cette étude, l’application du T.O.G semble constituer une approche valable pour cette portion de la population et mérite la reconnaissance en tant qu’outil ostéopathique puissant et respectable.

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